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CALE 1996

Acier, bois, néons, crics
H40/L680/P680cm


Dans le cas d’un espace clos, les parois des murs participent matériellement à l’élaboration de mes sculptures ; elles sont reliées méthodiquement et conceptuellement, des murs vers le centre de la salle (voir Deux bords ou Face-à-main). Je ressens la sculpture, physiquement, comme une ceinture autour de moi : les murs séparant « le monde extérieur » de mon travail à l’intérieur de l’espace.
Ma perception de l’espace définit un programme qui règle mes envies et ma manière de travailler.
Je me suis demandée comment procéder, sans dispositif sur les murs, pour créer de nouvelles pièces. Ma première résolution a été de construire des sculptures qui, dans leur composition, enfermaient une portion du sol. Nous étions en hiver lorsque je fis ma seconde visite à Glasgow pour revoir la salle d’exposition ; la neige recouvrait les rues de blanc, neutralisant les choses et les couleurs. C’est en rentrant à Paris, alors que j’étais déjà en train de construire Cale, que j’ai eu l’idée de couvrir la surface du sol de tramway avec du sel fin très blanc. La sculpture enclos un espace vide, j’aimais que l’on puisse le regarder sans qu’il soit physiquement possible de l’atteindre. J’ai tamisé le sol de mon atelier avec du sel (à l’intérieur et à l’extérieur du périmètre de la sculpture). En marchant le long de son périmètre, je laissais les traces de mes pas, tandis qu’au centre la surface du sel restait intacte. La neige fraichement tombée procure la sensation de paysage miraculeusement vierge, cette étrange impression est aussitôt détruite par l’inscription des premières traces de pas.
Les quatre sculptures Cale, Contrôle 3, Delta et Des idées délimitent un espace clos dans leurs contours.
Le sol de Tramway, uniformément blanc, s’est couvert de traces de pas pendant le vernissage. C’est le moment que j’attendais pour que mon travail soit enfin terminé. En visitant l’exposition, les gens sont allés d’une œuvre à l’autre, le trajet qu’ils ont emprunté est resté imprimé en mémoire sur le sol durant les trois mois d’ouverture de l’exposition. Les marques de pas sur le sel immaculé, relient les sculptures entre elles. En restant intact, vierge de toute marque sur le sel, les espaces enclos des sculptures insistent sur le caractère privé de mon travail par contraste avec l’espace public autour des œuvres, ouvert à toutes les libertés.