(série SEPT PIÈCES FACILES)
Échelle en bois, peinture murale
Dimensions variables, échelle H. 315,5 cm
Au centre d’art Le Grand Café de Saint-Nazaire, je rencontre une équipe et un lieu. Les qualités concrètes de l’architecture – lumière, sonorité, agencement des salles – me donnent des indications de travail précises, j’ai le désir de faire quelque chose de nouveau, j’essaie d’oublier tout ce que j’ai déjà fait. Née à Cherbourg, je suis attachée aux univers portuaires. Saint-Nazaire a stimulé mon intérêt pour le travail manuel, industriel et intellectuel, et son pendant : l’oisiveté, la rêverie, le songe, comme métaphores du processus de création. On entre dans le centre d’art en traversant deux vestibules vitrés. Le hall d’entrée distribue une petite salle sur la droite, et une autre sur la gauche. Les matériaux sont sommaires, c’est vide, blanc, et l’effet de contre-jour est très fort. De larges fenêtres panoramiques font face à un vaste rond-point. Au centre, un escalier en angle droit débouche sur une grande pièce claire et ensoleillée, séparée un peu artificiellement par une fine cloison en deux parties égales au plancher bien verni. L’espace enregistré, je construis une maquette de poche qui peut se replier et que j’emporte partout où je vais. L’usage de cette maquette durant l’été m’a suggéré des sculptures légères, libérées de l’architecture : grâce à la petite taille de la maquette, j’ai une vue plongeante sur le premier étage que j’ai posé sur le rez-de-chaussée, je n’ai pas fabriqué l’escalier qui les relie. Je voulais préserver ce sentiment de facilité et d’apesanteur dans les futures pièces à construire, quels que fussent les matériaux employés, ce qui m’a amenée à les travailler plus que jamais en détail : les assemblages, la qualité des surfaces, la simplicité d’exécution, leurs places dans les salles, leurs arrangements devaient donner l’impression de simplicité. J’ai imaginé des sculptures réunissant concrètement les salles du haut avec celles du bas, ou bien se prolongeant horizontalement vers l’extérieur sans me préoccuper des contraintes liées à l’architecture. La maquette du Grand Café, les sculptures, les images n’étaient que du papier plié, dessiné, collé, froissé. C’est dans la détente des jours immobiles que les idées surgissent. Une échelle en bois dont j’avais vu le modèle dans un magasin de fournitures industrielles est adossée contre les mots LAZY DAYS, peints au pochoir en ombre portée à l’aérographe.
Les caractères majuscules en retrait dont les contours dessinent des bords nets apparaissent immaculés, comme si la lumière du soleil les avait consumés, ne laissant que leurs ombres floues, décalées, noircies. La silhouette hyper-réelle des mots semble saillir de la surface blanche du mur, l’échelle flotte et paraît déplacée.
In the Grand Café art centre I met both a team and a place. The concrete qualities of the architecture – light, sound, the layout of the rooms – gave me specific indications as to how to work. I wanted to do something new and try to forget everything I’d done before. Ports are places I am drawn to. I was born in Cherbourg. Saint-Nazaire stimulated my interest in manual, industrial and intellectual work, and its pendant : idleness, daydreaming, pensiveness, as metaphors for the creative process. We enter the art centre via two glass-walled vestibules. The entrance hall leads to a small room on the right and another on the left. The materials are basic, it’s empty, white, and the contrejour effect is very strong. Wide panoramic windows give onto a big roundabout. In the centre, a staircase at a right angle leads to a big, bright, sunny room rather artificially divided into two equal parts by a fine partition with a well-polished floor. Having made a mental note of the space, I built a pocket-size model that could be folded up and carried wherever I went. From using this model over the summer I got the idea of light sculptures, free of the architecture : thanks to the small size of the model, I had a view down onto the first floor that I placed on the ground floor. I didn’t make the staircase connecting them. I wanted to preserve that feeling of ease and weightlessness in the pieces I would build later, whatever the materials I was using, and because of that I worked on the details more than ever. The assembly, the quality of the surfaces, the simplicity of execution, their position in the rooms, their arrangements all had to give an impression of simplicity. I imagined sculptures physically uniting the rooms on the upper and lower floors, or extending horizontally towards the outside, without concerning myself with the constraints due to the architecture. The Grand Café model, the sculptures, the images, were just paper that had been folded, drawn on, glued and crumpled. It is when you’re relaxing, on lazy days, that ideas come to you. A wooden ladder, the model of which I had seen in an industrial furniture shop, leans against the shadowed words LAZY DAYS, airbrush-painted with a stencil.
The discreet capital letters, the lines of which are sharply delineated, seem immaculate, as if the sunlight had consumed them, leaving only their blurred, staggered and blackened shadows. The words’ hyperreal silhouette seems to stick out from the white surface of the wall ; the ladder seems to float, as if it has been shifted.
Traduction anglaise : Charles Penwarden